Marble Hornets: Slenderman is watching you.
Marble Hornets est un film jamais terminé et imaginé par Alex Kralie, personnage de Marble Hornets , une Web série réalisé par Troy Wagner et Joseph DeLage (Alex Kralie). C’est notamment la série ayant popularisé (ou crée) certaine creepypasta comme Slenderman (rien que ça), Masky et Hoodie.
La série est entièrement disponibles sur YouTube sur les chaines
@MarbleHornets et
@totheark (pour un total de 5-6heures de visionnage total.)
Par principe Marble Hornets est un ARG, Alternate Reality Game (et là vous sentez venir la parenthèse de 3 pages sur les ARG…).
ARG est un nom donné aux fictions qui prétendent ne pas en être. De plus, il faut que la notion de « jeu » soit respectée, souvent en investissant le public dans l’histoire. Pour Marble Hornets, les gens pouvaient interagir en (quasi) direct sur Twitter avec Jay Merick, le personnage principale/narrateur et leur remarques, avis, conseils faisait (ou non) avancer l’intrigue.
Les ARG existent depuis des décennies, par le biais de livres, d’émission radiophonique ou de rubrique dans les journaux, mais c’est grâce à internet qu’ils se sont démocratisé. Aujourd’hui on en compte des centaines, plus ou moins bien fait, mais beaucoup ont pour point commun d’être inspirés par Marble Hornets.
Moi-même il y a deux an, ma petite Handycam en main, je me suis lancé dans la réalisation d’un ARG.
J’ai filmé plein d’endroits cool (et creepy, et moyennement légaux), écrit des pages et des pages de script, recommencer trois fois … puis j’ai découvert Marble Hornets et réalisé que je faisais la quasi même chose… mais 10ans plus tard. J’ai laissé tomber cette idée et choisie de deep dive dans l’univers des ARG d’horreur d’internet. J’y ai trouvé de l’inspiration, de la frustration de ne rien voir de bien inventif parfois, de revoir les même histoires, les même procédés, mais j’ai aussi ravivé ma passion de la recherche, du décryptage de code, et j’ai redécouvert un youtubeur français que n’ai plus lâché depuis (au cas où, je parle de Feldup et si vous lisez ça et que vous ne savez pas qui est Feldup, je vous mets le lien de sa chaine et je vous interdit de lire la suite de ce site sans être aller check son taf (de vidéaste, d’analyste ET de musicien)@Feldup /hj).
Plus qu’une subculture d’internet un peu edgy, les ARG sont devenus un style de récit, d’écriture, de montage, une esthétique, un marqueur d’époque… C’est une pratique à part entière mêlant cinéma, écriture, théâtre …
Au cours de la série, les personnages se font tantôt poursuivre, tantôt soumettre par une entité mystérieuse surnommé « l’Opérateur » (aucun personnages de MH ne le nomme directement comme ça, c’est un nom donné par les fan puis adopté par les créateurs). Cette entité, appelons le « OP », ne se déplace que très rarement en marchant (1 ou 2 fois dans l’entièreté de la série) et préfère se téléporter (du moins c’est une théorie qui fait consensus parmi les fans). Il semble aussi pouvoir voir à travers les caméras et se téléporter grâce à elles:
Après avoir abandonné ses amis, fuit la ville et Op, Alex vit enfin tranquille avec sa copine, Amy. Seulement le jour où il est filmé par cette dernière ayant retrouvé une de ses vielle caméra, Op apparait dans leur appartement. Si Op avait laissé Alex tranquille, c’est car celui-là avait arrêté de filmer (avec la caméra du tournage de son film) : soit il ne le retrouvait pas (…perso j’y crois pas) soit, Alex et lui avaient d’une certaine manière passer un pacte, un accord. Dans tous les cas, c’est la caméra en tant que concept et pas juste objet qui invoque l’Opérateur. En effet on pourrait se dire que c’est peut-être une question de lien entre la caméra d’Alex et feu son film qui procure à l’objet sa propriété invocatrice, mais au fil de la série cette hypothèse laisse place à la quasi-certitude que l’Opérateur peut voir à travers tout objectif et qu’il choisit de garder un œil (?) sur nos protagonistes. Les glitchs à proximité de l’eau, les modification du son et des paramètres de l’image lorsqu’il apparait à l’écran ne sont que plus d’éléments allant dans le sens de cette idée.
L’Opérateur est comme je l’ai présenté : extrêmement mystérieux. Au-delà de ses pouvoirs de téléportation, de télépathie et de télékinésie probable, on ne sait rien de lui. Même Totheark, détenteur d’une chaine YouTube où iel, un personnage non défini, poste des réponses aux vidéos principales donnant des indices sur ce qui se passe « réellement » , ne nous informe pas beaucoup. Les questions que l’Opérateur soulève ne sont pas tant « qui » ou « quoi », on comprend bien que son n’apparence n’est pas celle d’un humain déguisé. Ses membres étirés et son absence de visage n’évoque rien d’humain, il semble glitché. Seul son costume rappel à nos tradition terrestre.

Personnellement, les questions qui me brûle les lèvres sont plutôt « d’où » et « comment ». Son existence met les lois de la physique à rude épreuve. Mais plus qu’un cryptide ou qu’un fantôme, il remet en cause la réalité : son lien aux caméra évoque sa présence sur une autre dimension où tout ce que capte les objectifs lui sont percevable. Ce monde serait parallèle à celui des personnages humains, mais perméable, lui permettant de les localiser, de voir à travers deux calques à la fois. Ainsi, cette dimension alterné serait-elle son univers d’origine ? Pour quelle raison venir sur Terre alors ?
Vous le comprenez surement à travers l’abondance de conditionnel, Marble Hornets est une série qui pose plus de questions qu’elle ne donne de réponse. C’est cependant une expérience que je juge incontournable de l’horreur sur internet, une pionnière de ce qu’on appelle « analog horror » (style de contenu (jeu, série, ARG, film …) horrifique répliquant les technologique analogique (caméra VHS, télévision cathodique…) et leur esthétique (émissions de télé des années 80/90, spot publicitaire, annonces gouvernementale…).
Marble Hornets en tant qu’ARG à crée une communauté, des groupes de personnes suivant l’histoire, décryptant chaque détails pouvant être un indices, alimentant le Wikidot de la série (http://marblehornets.wikidot.com/ )de théories, résumés d’épisodes, fiches personnages et même des retranscriptions des dialogues ou des descriptions frame by frame de la série…
Un jour, lors d’un workshop, je discutais avec l’intervenante, et je parlais d’ARG, de web série et de création sur internet. Elle m’a alors regardé, incrédule et m’a demandé quelque chose du genre : « mais iels y gagnent quoi celleux qui font ça ? ». Sur le coup, ça ma blesser : que quelqu’un puisse pensait à l’argent avant la création, surtout dans une école d’art (j’étais en première année, je pensais encore les artistes au-dessus du capitalisme…), qu’on me demande ça plutôt que des références, des informations complémentaires. Aujourd’hui je comprends mieux à quelle point c’est dur de vivre, a quelle point l’argent est nécessaire … et à quel point la communauté aussi.
Je pense que, madame-je-ne-sais-plus-quoi, c’est cela qu’iels y gagnent les gens qui font ça. Je pense qu’iels y trouvent leur paires, des gens qui partage ce qu’iels aime, ce qui les habitent. Iels y trouvent ce que nous cherchons toustes à un moment ou un autre : quelqu’un à qui parler et qui nous comprenne. Car ce n’est certainement pas la rémunération ni la reconnaissance qu’iels cherchent, la plupart de ces créations étant anonyme, le plagiat et le vol de contenu étant plus que fréquent, la rémunération sur internet plus que compliquée.
Internet peut être hostile et dangereux, d’autant plus en étant jeune, créatif.ve … Mais c’est aussi une Safe-place pour beaucoup, un lieu de partage, de discussion, de création. Négliger un de ces aspects serait fermer les yeux et mentir. Réduire internet au capitalisme serait comme dire que nous n’existons qu’à travers lui. Or je ne pense pas que ce soit le cas : je pense que nous existons malgré lui. Et il n’est pas absent d’Internet, bien-sûr que non, Internet ne sera jamais un havre de paix anticapitalisme, antifasciste. Déjà parce que Elon Musk existe, mais aussi parce qu’Internet est un désastre écologique, social, politique. Mais nier que certain.es d’entre nous peuvent y trouver un endroit de calme, de paix, de joie, de partage, de conseil, d’écoute, d’amour parfois, c’est faire disparaitre ces aspects, c’est faire disparaitre la lutte, ne garder que ce qui nous blesse. Cet écrit n’est pas un manifeste politique ni une critique sociale, c’est un partage d’existence tout au plus, un appel à la bienveillance, voir à la douceur. Parce qu’il n’y a pas de lutte sans care. Parce que sans care on ne survivra pas. Parce que nous avons besoin de communauté, j’ai besoin de communauté.
Alors madame-je-ne-sais-plus-quoi, c’est cela qu’iels y gagnent les gens qui font ça. Ce sont des artistes, des créateurices, des ecrivain.es, comme tout autant de gens dont vous ne remettait pas le travail en question.